Billie Holiday…..
Le 11 juillet 1959 (il y a 50 ans..) nous quittait Billie Holiday…… Déjà…. et pourtant…. elle est bien dans nos cœurs et dans nos discothèques…Billie avec Lester chez Teddy Wilson, Billie poignante sur des vidéos à présent célèbres…Billie for ever!….
Pour en parler, qui l’a mieux fait que Marc -Edouard Nabe dans un superbe ouvrage (“l’âme de Billie Holiday “(Denoël)) , que j’ai lu des dizaines de fois (nous sommes nombreux dans ce cas) et que je ne peux que vous recommander. Je vous livre ici quelques extraits: “elle était heureuse de chanter si tristement. Seule la musique la mettait à l’aise.”..
Ne soyons pas choqués. Les mots suivants sont durs très durs, mais ils évoquent si bien Billie qui a vécu un calvaire quand elle n’était pas sur scène ou dans le studios ou…dans un bar avec Lester Young…” Elle fait bien pute avec ses sourcils au compas et sa bouche pas encore tordue. Rondelette aux cheveux courts, les dents trop blanches, le regard ingénu de celles qui ont déjà bien sucé. De celles qui plus tard auront beaucoup vécu..”.
Et puis, sur sa manière de chanter, encore et toujours Nabe: “ce ne sont pas vraiment des mots, ce ne sont pas vraiment des notes. Vous ne trouverez ça nulle part au monde. Ce que Billie Holiday émet sort de l’ordre ordinaire”, c’est de l’alchimie sonore”..”Billie ne choisit pas ses notes, elle les appelle”.
Et puis, il y a dans la vie de Billie, Lester Young !….Nabe parle de “Lestair”….Magnifique non ? “…..Il avait l’effacement particulier de celui qui est sûr de son art, certain et conscient de sa valeur…Chez Basie surtout, on l’entend passer des figures sur lesquelles bien des tenors s’interrogent encore”. Le plus touchant: Lester avait une relation particulière avec Billie...” tout ce qu’un homme et une femme peuvent faire ensemble, Lester Young et Billie Holiday l’ont fait , sauf ça”..” ni ami, ni amant : Lester était peut -être son amiant…”.
Tout amoureux de jazz, de Lester, de Billie….connaît cette vidéo fantastique…CBS a créé un show inoui en 1957…Nabe a raison d’écrire: “tout à coup , la télévision devient utile!.”..”Fine and mellow”, un blues à n’en plus finir, avec , autour de Billie, assise sur un tabouret, et dans l’ordre d’apparition à l’écran, Ben Webster, Lester qui se lève comme un fantôme et qui joue!…, Vic Dickenson, Gerry Mulligan, Coleman Hawkins, Roy Eldridge (qui décolle vraiment). Je reviens sur Lester…Nabe encore lui, écrit mieux que personne ce que l’on voit et écoute…” Lester Young soudain se lève à droite, assez brusquement comme un conférencier appelé à parler. Billie n’a pas le temps de répondre à la grenouille (Ben Webster P.F.), le président est filmé de face, plein pot sur sa gueule aux petits yeux boudinés: il souffle cinq notes avec lesquelles il atteint l’un des plus beaux exploits du funambulisme universel. Trois fois rien en mi bémol: tout son style est là et tout son angélisme. La caméra descend le long de Lester et après les mains, s’arrête au pavillon: elle passe la tête de Lady, de 3/4 droit, plus belle que jamais, acquiescant d’amour, se mordant les lèvres de tant comprendre ce que Lester lui chuchote”…
Ça se termine moins bien. On ne voit plus Lester….Mais le film reste, que nous nous repassons en boucle. Les grands artistes ne meurent jamais. Le disque, la vidéo, le souvenir aussi les rendent universels….