Ce sacré biniou!
J’adore cette photo. Elle figure sur un de mes bouquins (“le jazz dans tous ses états” .Franck Bergerot. Larouse) . Je l’ai recherchée sur Google pour l’avoir en bon état. Sur des centaines de photos de Coleman Hawkins, je ne l’ai pas retrouvée…Donc, je l’ai photographiée cette photo (je n’ai pas de scanner!) et la voici!…Si quelqu’un la possède en mieux, qu’il me l’envoit!…
Tout ça pour vous dire que je raffole vraiment de ce cliché. Hawkins regarde son instrument comme un ami ou ..comme un adversaire…. Il sait qu’il va l’accrocher à son cou, qu’il va emboucher le bec et qu’il va essayer de faire (il y arrivera!) avec la plus belle musique du monde….Il a l’air de lui demander beaucoup de choses à son sax!….
Ceux qui ont bien connu Guy Lafitte, doivent retrouver ici l’expression de Guy, qui avait aussi toujours une cigarette à la bouche, quand il ne jouait pas du sax!…J’ai toujours été frappé par la ressemblance entre les deux hommes, y compris dans leurs mimiques. Il faut dire que le gascon vénérait “the Bean”!….
Ce regard de “Hawks” sur son horn me fait penser au rapport qu’ont les musiciens avec leur instrument. L’amour, la haine, non pas, j’ose l’espérer, de l’indifférence…..ou de l’oubli…. Tous les isntruments de musique sont des prodiges d’invention. Ce n’est pour le sax du moins, qu’un montage de clefs, de tampons, de ressorts sur un alliage de laiton!… Et pourtant, ça fait (parfois…) de la musique…
On se l’aime notre instrument!. On en a souvent changé, mais pour beaucoup, c’est le même biniou depuis toujours…Pour moi, cela fait 31 ans que je me promène avec mon mark 7 Selmer et je me l’aime. Je l’ai trimballé partout (coffres de voiture, d’avion, de bateaux (actuellement!) , il est tombé, je l’ai fait redresser. Il a fait partie de toutes les aventures les plus inimaginables……Il a lâché de toutes part, il est devenu aphone!, il s’est remis à marcher et puis….il s’est habitué à moi, comme le cheval sauvage à bout de souffle dans les “Désaxés”.
Chaque musicien pourrait vous parler des heures de son instrument. Tous ont une histoire…S’ajoutent pour les saxophonistes, les becs (souvent changés, parfois trafiqués), et les anches, dont la nature est d’être rebelles… Don Byas, qui a vécu en France dans les années 50, passait son temps à confectionner des becs en compagnie de Michel Roques ou de Jean Claude Forhenbach. Il utilisait des anches très dures, des “lattes de parquet”!….mais quel son magnifique…Toujours pour les batailles de Sax, Il y a les partisans des becs en ébonites (assez utilisés par nos amis français), mais les américains ont utilisé les Otto link, avec ce son puissant et timbré. Oui, il faut être un peu timbré pour jouer de saxophone!….. Mais les autres instrumentistes peuvent eux aussi en raconter…. les trompettistes avec les pistons qui restent bloqués, leur éternels débats sur les embouchures. Les trombonistes qui refusent de rester en coulisse, les pianistes (piano acoustique, piano numérique, synthé), les bassistes qui ne vendraient pas leur âme au diable, les guitaristes (demi caisse, cordes nylon…). Je viens de voir qu’il existe dans facebook un coin des cuivres. Quelqu’un peut il me donner une adresse pour causer chiffons avec les saxophonistes? ….
Ma passion m’emporte. Je vais regarder mon sax comme Hawkins. Et je vais faire en sorte de ne pas seulement le regarder!….
Tiens, Monsieur Hawkins, vous cherchez quelque chose ? Votre bocal sans doute…L’inspiration et le gênie, ça m’étonnerait beaucoup…Vous l’aviez en vous en permanence…Chapeau!