l’argot des musicos

le piano tirelire

Peut être est-ce mon petit voyage récent chez Audiard ou la lecture d’un San Antonio qui m’a donné cette idée?.

Cela faisait longtemps que je voulais répertorier et rendre encore plus proches de nous tous ces expressions issues du monde des musiciens. Dans le titre du billet, j’ai employé le terme de “musicos”, car cette appellation , englobe les vrais musiciens et les musiciens du dimanche, pas toujours aguerris. Toutes ces formules, souvent de bonnes blagues,  sont amusantes, mais parfois très méchantes. Elles sont le plus souvent utilisées par les musiciens entre eux.

En ayant toujours apprécié les “chroniques de jazz“ de Boris Vian, j’ai aussi, pour rédiger ce billet,  pioché abondamment dans le petit bouquin de Alain Bouchaux, Madeleine Juteau et Didier Roussin “l’argot des musiciens”. Ce petit trésor est édité par “Point virgule”. Les dessins de R.Crumb viennent illustrer avec bonheur ces pages savoureuses.

J’invite les lecteurs à compléter cette liste, et en corriger éventuellement les erreurs.
Alors, commençons notre joyeux inventaire. Voici comment le langage des musicos a transformé les choses…

Les instruments de musique:

L’accordéon: la boîte à punaise, la boite à frissons, le piano du pauvre (même si cet instrument peut coûter très cher!), le piano à bretelles, le soufflet à chagrins, le dépliant, le ralé- poussé (expression réunionnaise qui nomme ainsi la petite bagarre). L’accordéoniste chromatique peut utiliser le registre de commerce, c’est à dire un jeu à vibration.

La cornemuse: la couineuse.

Le trombone: la seringue.

La clarinette: la claribole, la pibole, le bâton de réglisse.

Le saxophone: le baveux, la carotte pour le saxo soprano.

Notre ami Eric Ossau et son amoureuse. Dessin; Duverdier.

La guitare: la guitoune, la râpe, la gratte, la plaque, l’amoureuse.

La contrebasse (à cordes): la grand mère,

La batterie: la batteuse, la quincaillerie.

La harpe: le sèche-linge. (c’est dur pour un si noble instrument)

Le violon: le grincheux, L’arbalète désigne l’archet.

le piano : le râtelier (surtout pour désigner le clavier). La commode va désigner le piano droit.

Le mot biniou est utilisé pour beaucoup d’instruments, mais principalement pour la clarinette, l’accordéon ou le saxophone (“t’apportes ton biniou?”).

Le métronome: le juge de paix (ça me plaît bien!).

Un mauvais instrument  ou difficile à jouer: une charrue.

Les expressions concernant les musiciens:

Al Grey par Duverdier

le boutonneux l’accordéoniste.

Le pipouilleur le clarinettiste.

Les bêleuses: les choristes.

le sémaphore: le chef de musique qui dirige avec de grands mouvements de bras.

Un requin:Pas nécessairement péjoratif. Au contraire, c’est un habitué des studios capable de lire d’un seul trait les “chiures de mouches”.

Un escroc  : celui qui triche, qui remporte des succès importants avec peu de technique

les feuilles mortes  : très péjoratif. C’est un musicien (!) qui a laissé ses oreilles en jachère.

Les expressions concernant les habitudes des musiciens ou utilisées par eux :

Jouer berger bulgare  : jouer avec emphase , avec un lyrisme insupportable, dans un style peu partagé par les autres musiciens.

Y a du brouillard  : grande difficulté pour lire une partition,

Jouer Beyrouth  : se dit d’un batteur qui cogne de bon cœur  ! Avec une terrible force de frappe. On parle parfois d’un bûcheron.

Chanter en yaourt : s’exprimer en onomatopées avec une vague imitation de l’anglais ou d’autres langues (Daniel Huck est notre spécialiste de ce scat qu’il sait rendre délirant  ).

Scier du bois  : jouer sans conviction mécaniquement, surtout à l’archer.

Faire des pirlipipis  : phrasés accordéoniste et de clarinettistes qui abusent des triolets.

Chauffer  : jouer avec une forte expressivité en appuyant bien sur les contre temps. On dit aussi «  jouer hot  ». Chauffe ne veut pas dire nécessairement swing. Mais le résultat est souvent heureux. Tout le monde se rappelle de «  chauffe Marcel»   lancé par Jacques Brel à l’accordéoniste Marcel Azzola dans «  Vesoul  ».

Faire la mayonnaise  : pour un batteur, jouer de façon continue et simple avec ses balais.

Faire de la galantine  : meubler entre les morceaux ou pour faire face à un incident.

Faire le chocolat  : jouer les lignes de basse les plus simples possible comme tonique- dominante.

Cuivrer  : obtenir sur un instrument à vent une vibration telle qu’on peut entendre les harmoniques. Pas souvent de bon goût.

Savonner  : rechercher la note ou le bon phrasé par glissements au p’tit bonheur la chance.

Jouer Pétain  :  Se dit d’un trompettiste qui joue avec un horrible vibrato, rappelant la voix du Maréchal  !

On le tue  : il faut vraiment terminer le morceau  !.

Faire la manche  : jouer gratuitement souvent dans la rue ou le métro.

Cachetonner  : rechercher les cachetons (affaires payées) parfois même si les conditions ne sont pas fameuses. Jouer le plus souvent possible même pour de petits plans.

Faire le bœuf  : expression très connue. Réunion de musiciens qui jouent entre eux pour la plaisir. On dit aussi  : faire une jam. (jam session)

Ca sent la roulotte  : se dit des musiciens de style manouche ou l’endroit où se joue cette musique.

Mettre des pains  : faire des fausses notes. Parfois, c’est la boulangerie  !

C’est galère  . Mauvaise affaire, ou contexte défavorable.

C’est la maison du café  . Lorsque un musico utilise des harmonies discutables, qui ne concernent pas le morceau, c’est la maison du café. Notre ami André Dabonneville en avait fait une de ses expressions favorites.

Arrangements à l’amiable  : Plutôt péjoratif . Se dit de ceux qui emploient des accords ou des conventions à leur manière,  sans grand respect du morceau ou du type de musique. A associer aux accords de Grenelle.

“de Monsieur Seguin”. Plaisanterie utilisée par un musicien à la fin d’un set pour annoncer “’ainsi s’achève…”

Aller faire l’ouverture de la flûte enchantée: aller assouvir un besoin naturel. La flûte à un trou(!) est alors utilisée…

Mettre un instrument au clou: le porter dans un mont de piété pour récupérer un peu de monnaie. Charlie Parker le faisait souvent.

On rentre la vache: Expression landaise utilisée par les speakers aux courses de vaches. L’animal a assez couru. Tout le monde s’est bien amusé. Fin de la récréation.  Notre ami Alain Saint Arroman utilise beaucoup cette phrase lorsque ça dure trop et qu’on attend les musiciens à la buvette.

Titres de thèmes revisités:

Les bigoudis  : lady be good

Haricot vert the waterfront  : I cover the waterfront

Le chèque  : the sheik of Araby.

 

Amis musiciens , amis musicos, amis de la musique, J’espère que ce petit billet vous a plu. Attention, si vous voulez utiliser ces expressions, vous risquez fortement la gaffe!….

Merci à Jean Duverdier pour ses dessins.

A très bientôt.

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