Freddie Hubbard est mort
Freddie Hubbard, est décédé à l’hôpital de Sherman Oaks en Californie, ce matin 29 décembre à l’âge de 70 ans, des suites de la crise cardiaque dont il a été victime le 26 Novembre.
Il a joué avec des artistes comme John Coltrane, Ornette Coleman, Bobby Hutcherson, Oliver Nelson, Andrew Hill, Eric Dolphy, Herbie Hancock, Wayne Shorter, McCoy Tyner et d’innombrables autres.
Hubbard a également enregistré plus de 300 albums en tant que leader et sideman, avec un imposant héritage solo sur les labels Impulse!, Blue Note, Atlantique et CTI Records qui a produit son plus grand succès, l’album Red Clay. Plus tard, il a enregistré pour Columbia, Elektra, MPS, Music Masters, Telarc, Hip Bop et Enja Records où il a fait son dernier album, “On the Real Side”, publié le 24 Juin 2008.
Freddie Hubbard & Joe Henderson – Maiden Voyage
Merci Dominique pour avoir complété largement mon court récit. Je ne me souvenais pas que Freddy Hubbard était arrivé dans ton dos en jouant…Mais je me souviens effectivement très bien des béquilles de Marcel et de la poupée d’Eric. Je vois aussi le visage terrorisé de Michel Mariescu notre pianiste..Sur ta reflexion homme-musique, je connais moi aussi des musiciens détestables dans leur comportement en dehors de la scène…mais ils sont heureusement rares…C’est comme ça, mais ils arrivent à bien jouer…Ce ne sont pas les mêmes neurones qui fonctionnent…
Quelques précisions et un souvenir personnel complémentaire sur l’anecdote contée par Pierre concernant Freddy Hubbard.
En fait, nous étions programmés dans le cadre du festival de jazz de Gasteiz afin d’assurer le lancement des boeufs après les concerts. Une mission de responsabilité ! Les jams -et donc nos prestations préliminaires, elles avaient lieu sous forme de concert avant l’arrivée des boeuffeurs qui, peu à peu, pouvaient nous remplacer- étaient retransmises en direct sur radio Vitoria ! Elles avaient lieu dans l’un des salons de l’hôtel où logeaient la plupart des musiciens. Tout au moins les plus importants ! Il fallait une certaine dose d’inconscience d’autant que la programmation était d’un niveau particulièrement élevé et, qu’en raison des lieux, tous les musiciens défilaient au cours de la nuit. Avouons-le, un certain malaise régnait au sein du groupe. De plus,pour couronner le tout, Marcel, notre clarinettiste – saxophoniste, avait une jambe dans le plâtre et se déplaçait avec des béquilles. De son côté, notre contrebassiste, Eric, peu habitué à jouer plusieurs jours d’affilée, s’était fabriqué une poupée pour protéger l’index avec lequel il caressait les cordes de son instrument. Cela provoqua d’ailleurs l’hilarité de Jimmy Woode, le grand contrebassiste d’Ellington, lorsqu’il s’en aperçut… Mais revenons à Freddy Hubbard.
Je venais d’exposer le thème de “Lover Man” et prenais ma respiration avec courage -j’avais aperçu dans la salle quelques silhouettes légendaires !- pour attaquer le chorus quand, derrière moi, s’éleva l’une des plus belles phrases musicales qu’il m’ait été donné d’entendre avec un son d’une rare beauté, le plus large, à la fois puissant et soyeux. Du vrai velours ! Je me souviens avoir regardé ma trompette non sans dépit -n’était-elle pas en plastique ?- et m’être tourné pour découvrir qu’il s’agissait tout simplement de… Freddy Hubbard !
Un ou deux morceaux plus tard, nous étions à notre juste place : dans le public ! Harold Jones avait remplacé Jean à la batterie et Jimmy Woode, sans poupée, pulsait à la contrebasse…
Autre souvenir, parmi quelques autres du grand trompettiste et bugliste : un autre moment à Vitoria quelques années plus tard.
Les concerts au Polideportivo s’étaient tus. A l’affiche ce soir-là, Michel Petrucciani et Freddy Hubbard plus quelques autres du même niveau. Dans le hall de l’hôtel, après les concerts, les musiciens circulaient incessamment entre les étages, le hall et le bar. J’avais accueilli Michel Petrucciani quelques semaines auparavant au théâtre de Bayonne pour un beau récital consacré à Duke Ellington. Il était assis dans le hall sur les genoux de son épouse. J’allai le saluer. Il m’invita à m’asseoir à ses côtés. Un peu plus tard, Freddy Hubbard nous rejoignit. Après s’être congratulés rapidement à propos du concert, ils se mirent à discuter librement. De musique ? Non, de leurs tournées respectives avec les problèmes d’avion, des meilleures “affaires” des dernières semaines, bref de boutique, émaillant leurs propos de réflexions salaces et grivoises ponctuées de rires gras qui auraient effarouchées les moins pudibonds… S’il n’y avait eu l’admiration et la connaissance de l’oeuvre de ces deux maîtres, je les aurais définitivement catalogués sur la liste noire de mes connaissances.
Le talent de l’artiste et son humanité sont parfois peu proportionnées. Je m’en suis fait plusieurs fois la réflexion au cours de mes rencontres avec certains grands du jazz. A ce sujet, je me souviens de cette interrogation d’un amateur de jazz -injuste en l’occurence- à propos d’un musicien qu’il admirait pourtant : “Comment un tel sinistre individu peut-il produire une aussi belle musique ?” Outre le fait qu’il ne faut jamais juger un homme trop hativement, il y a parfois une distance entre la réalité et l’idéalisation que nous nous faisons vis à vis de ceux qui, par leur Art, nous donnent tant de bonheur…
Belle Histoire Pierre
Les “happy feet”,(orchestre bayonnais, à présent disloqué dans la nature…) nous avons un souvenir précis de Freddie Hubbard. Nous étions à Vitoria en Espagne et nous jouions dans un hôtel. Ce devait être dans le début des années 80. Pendant notre set, Freddie Hubbard, qui venait de se produire au cours du grand concert dans la ville, est entré dans le bar en compagnie du bassiste Jimmy Woode. Nous étions très impressionnés, surtout lorsque les deux hommes nous ont rejoint sur la petite scène pour jouer avec nous….tout cela avec simplicité….mais une grande autorité….Aucun d’entre nous n’osait jouer, tant il était formidable d’écouter les deux hommes….